Mélodies pour l'automne

WINDSOR FOR THE DERBY We fight til death

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Se battre jusqu'à la mort. Se battre pour défendre sa propre esthétique musicale, c'est le fer de lance de Windsor for the derby, groupe bâti autour de Dan Matz et Jason Mcneely. Leur esthétique s'est déplacée, l'espace de cinq albums. D'un post rock tourmenté et émergeant en 1994, le groupe a glissé vers une pop sombre, nostalgique, futuriste et passéiste à la fois. Se battre jusqu'à la mort pour donner un sens à l'adjectif indépendant dans l'expression "rock indépendant".

Mon premier réflexe, à l'écoute de "We fight til death", a été d'aller réécouter "The emotionnal rescue", album écouté en boucles à sa sortie. Et là, pas d'accroche réelle, pas même de réelles réminiscences. Des beaux morceaux, qui ne touchent plus. Comme si Windsor for the derby créait une beauté temporelle, éphémère, à consommer sur place. Une beauté rare en tout état de cause.

"The melody of a fallen tree", petite perle de saison, débute magnifiquement ce disque. Synthés kitschs et datés, kicks de batterie et riffs de guitare acoustique dressent le décor pendant plus de deux minutes. Dès que Dan Matz chante, le morceau commence à se greffer en l'auditeur, à faire son effet, jouissif. Les mots stagnent en l'air, rebondissent et nous cognent.

Windsor for the derby sait parfaitement mettre en scène sa pop, sait mettre en place un décorum évocateur. Mais ce que le groupe maîtrise peut être le mieux, c'est de savoir trouver l'équilibre entre mélodies liquoreuses, éthérées et pop concrète, terrienne et brutale. Une brutalité qui trouve sa source à la fois dans l'usage répété de la répétition, et dans l'absence d'explosion du disque, fait de tensions permanentes. We fight til death donne envie de danser, pour évacuer cette tension.

Krautrock à la Can, cold wave à la Joy Division ("The door is red") et new wave à la Cure, tout passe à la moulinette d'un groupe inspiré, surprenant. Les plaisirs sont variés, les plaisirs sont légion. Les éléments électro y sont pour beaucoup, notamment sur "Logic and Surprise"(dont un première version apparaissait sur la compilation Acuarela Songs 2) et "A spring like sixty", deux bijoux pop de l'album, à se passer et à se repasser.

Se battre jusqu'où? Windsor for the derby va très loin. "Flight" conclu en toute quiétude un grand disque, dont le futur nous dira s'il y avait cette urgence à le "consommer", à le boire. Et après tout, si ce n'était qu'une beauté éphémère, ce serait déjà beaucoup.

WINDSOR FOR THE DERBY, We fight til death
(Secretly Canadian)

http://www.secretlycanadian.com