JENNY DALTON
Fleur de Lily
par Igor le Blacklisté
"And I scream at the sky and it says : I have my secrets, my deep dark secrets."
|
JENNY DALTON
Fleur de Lily |
|
“My Space Anonymous”. C’est le titre auquel vous avez échappé car, comme vous, j’ai été accroc à cette drogue qu’est My Space pendant quelques semaines. Heureusement, les amis virtuels, c’est lassant et je vais mieux. Je ne m’y connecte pas plus de dix minutes par jour maintenant… Certes, Myspace a ses charmes car c’est une sorte de vivier underground où il est possible de faire de merveilleuses découvertes. L’une de mes découvertes se nomme Jenny Dalton et nous vient de Minneapolis. Lorsque le hasard a amené mon esprit usé jusqu’à sa page, ‘At ease’, le morceau qui ouvre l’album, s’est automatiquement mis à jouer, le charme a immédiatement agi. Je rapprochais déjà cette superbe chanson des titres poignants d’une Kristin Hersch version piano, avec une voix plus claire, des paroles énigmatiques mais suffisamment évocatrices pour que vous puissiez les interpréter, voire vous y retrouver. Le second titre, ‘Snake Oil’, n’a fait que prolonger cette impression plus que favorable.
En attendant de recevoir un exemplaire promo (qui ressemble d’ailleurs plus à un cadeau très féminin auquel il ne manquait que le parfum qu’à un vulgaire promo), ces deux morceaux ont tourné en rotation lourde dans ma radio personnelle qu’est ma clé usb. Jenny Dalton avait alors quelque chose de mystérieux. Une mélancolie persistante se dégageant du piano, une lassitude menaçante s’échappant de sa voix et les problèmes relationnels revenant comme un thème incontournable. Puis, le mystère s’est éteint, le matériel promotionnel expliquant didactiquement que la majeure partie des chansons furent inspirées par la relation de la chanteuse avec un soldat réserviste appelé à servir la patrie en Irak. (« Est-ce que cet album existerait sans GW Bush ?? » est un autre titre auquel vous avez échappé.) Le charme désuet des photos décorant Fleur de Lily et l’imagerie des femmes américaines attendant leur soldat de mari véhiculé par les films hollywoodiens génèrent inconsciemment en nous l’idée de la femme attendant sagement à la maison, priant pour oublier la peur et raccourcir la séparation mais, ici, c’est l’échec d’une relation causé par le traumatisme mental de la guerre qui est décrit par une personne constatant ces changements mais semblant impuissante face à eux.
Il y a précisément un sentiment d’impuissance terriblement attrayant chez Jenny Dalton ; le thème récurrent de l’abandon ne faisant que renforcer cette impression. Combien de fois entend-on ‘give up’ ou ‘give in’ ?? Si la musique, la voix de Jenny Dalton et ses mélodies obsédantes se rapprochent plus de Tori Amos (avec des lignes de piano moins complexe mais pas forcément moins belles) que de Kristin Hersch, le quotidien douloureux qu’évoque ses paroles renvoie plus à cette dernière, voire à Lisa Germano. Le plus troublant réside dans le fait qu’il est difficile de déterminer de quel point de vue certains titres sont écrits. Dans le magnifique ‘Circles’, qui est-ce qui ne pas marcher, parler, manger, dormir et qui est heureux ainsi ?? La plupart des titres sur l’album sont enregistrés en groupe, créant un penchant plus pop-rock mais les chansons piano-voix apportent un côté plus sombre et éthéré (‘Bad Day’, ‘Cadence’, ou encore ‘Deep Dark Secrets’ évoquant le meilleur de Kate Bush l’espace d’un refrain), plus intense aussi sur ‘This Again’ avec son piano et sa mélodie vocale entêtants au service du thème de la chanson, le this again désignant le fait de tuer quelqu’un.
Ce premier album de Jenny Dalton intitulé Fleur de Lily, disponible depuis un mois, est déjà un de mes favoris de 2006.
FunkyRate :
JENNY DALTON, Fleur de Lily
(Glossy Shoe Box)
http://www.jennydalton.com/
http://cdbaby.com/cd/jennydalton
|