Mais qu’y a-t-il de
si spécial à Glasgow ?
par Quentin Interrogation qui me taraude. Mais qu’y a-t-il de si spécial à Glasgow ? Apres un petit moment passe à recenser les groupes locaux, je me suis aperçu de leur étonnant nombre et aussi de leur diversité. Car certes, il y a de la pop (inévitable en terre anglo-saxonne), mais post-rock et électro poussent également ici. Que donnent les mères à leur enfants qui puissent les faire évoluer vers cette riche scène musicale ? Est-ce le microclimat ? Je l’ignore. Glasgow est une ville en pleine reconstruction ou des disparités naissent. L’exutoire de certains surdoués s’est dirige vers la musique, qui , outre la reconnaissance, leur permet de l’évasion, de la chaleur et est un moyen d’expression privilégié. Alors, un petit panorama (non exhaustif) de ces acteurs plus ou moins célèbres parait s’imposer… Et comment ne pas commencer par l’incontournable Belle and Sebastian ? Chacun a son avis, plus ou moins exaspéré par le comportement mystique du leader de ce collectif pop, Stuart Murdoch, qui va jusqu’à donner une photo d’un ours en peluche quand on lui demande de lui tirer le portrait. Mais à part ca, la douleur, il la chante comme nuls autres. Pop feutrée ou s’enchevêtrent cuivres, claviers et cordes, créée pour des ballades évocatrices d’une cicatrice encore mal refermée ou d’un passe trop oppressant. Auteur de son quatrième album l’été dernier (Folds your hand child, you walk like a peasant / Jeepster), c’est néanmoins dans le format court du Single que le groupe excelle et desserre son étau. " This is just a modern rock song " et l’inattendu " Legal man " se savourent d’une seule gorgée, laissant souvent le groupe nausée d’une mélancolie débordante. De son attitude dictatoriale, Murdoch a du constater ses méfaits, avec le départ de Stuart David (membre fondateur de l'escouade) vers les cieux plus électroniques de Looper, lequel déçoit plus qu'il n'étonne. On ressent quelque chose de forcé, de pas naturel. Deux albums à son actif et une poignée de singles pour le groupe qui vient de rejoindre le label Mute. Heureusement, on trouve quand même des occasions de se délecter, comme avec la fameuse "Ballad of Ray Suzuki". Pas de quoi casser des briques... La surprise vient sans conteste de l'émancipation d'Isobel Campbell qui, l'an passe a prouvé dans le second opus de Gentle Waves (nom inspiré par la Nouvelle Vague), sa formation, qu'elle détenait en elle un pouvoir certain de composition. "Swansong for you"(Jeepster, 2000) est une sucrerie qu'on fait fondre entre la langue et le palais. Chétive, embarrassée sur scène, habille à la mode 60's, elle communique une douceur venue de loin. Même si la mièvrerie de certaines paroles ("Rain is falling from the sky, it touches everything"-Flood) ternie un peu l'ensemble, on passe des moments de grâce dénudée sur "Partner in Crime", on flirte avec des intonations jazzy voire bossa-nova("Sisternova"), on aperçoit même l'ombre de Gainsbourg("Pretty things"). Gentle waves et Belle and Sebastian abritent le même pensionnaire aux claviers: Chris Geddes. Ce dernier, non content de faire en plus le DJ dans une boite du centre ville, est également membre de V-Twin. L'occasion à été donnée de voir un concert gratuit du groupe dans une église désaffectée. Du bon et beaucoup de moins bon, l'alcool aidant. Cela dit en 1999, on avait appris à adopter le sextet avec un appréciable EP, "Thank you baby"(Domino, 1999), dont la pop est susceptible de séduire même des profanes. La aussi, cuivres et claviers donnent corps a cette musique, qui sait avoir ces instants de générosité (Thank you baby, le titre, est un tube en puissance). Géniteur de l'album "Free the twin", l'an passe, un groupe a surveiller. A noter absolument, toujours chez Domino, Bill Wells Trio (dont les membres accompagnent parfois Gentle Waves sur scene), qui succède au déjà remarquable Bill Wells octet. Jouant dans une cour ou il est difficile de s'en sortir, B.W.T fait figure de prodige. Base sur une instrumentation solide mais restreinte (trompette, harmonica, guitare, piano), le groupe a su contourner les dédales de l'ennui. Issu du dernier album (Incorrect Practice, 1999), "Burmac" ou "Bad Plumbing" montre un éventail passionnant de symphonies et procurent une sensation de relaxation. Un confort moelleux. Une tasse de the, c'est parfait. Et bien dans l'ombre, deux visages de démarquent. Avec sa pop téméraire, Life without buildings, l'espace de 3 singles (Tugboat records), a montré l'étendue de sa substance. Quatuor pop classique (chant, guitare, basse, batterie) qui fait son trou, restant un peu poussif sur disque (voir fatiguant avec la voix de la chanteuse Sue Tompkins), mais prenant de l'envergure en concert (le groupe a notamment fait la première partie écossaise de Hefner), on scrutera leurs nouvelles trouvailles. Le "Young offenders" EP affiche déjà de belles prétentions, et laissent présager un éclos plus libérateur. En fait, de la superbe, on en trouve à revendre du cote de Bridget Storm, qui, à travers un 3 titres éponyme l'an passé, a bouleversé les plus frigides, créant des ambiances subtiles, pleine d'amertume. Menée par l'imposante Julie Mc Larnon, la formation allie Moog, violon, violoncelle, accordéon, piano, guitare, basse et batterie a une voix divine (des intonations PJ Harvey, Suzanne Vega et Alison Goldfrapp). Le tout, pour de pures envolées lyriques. En guise de conclusion, l'instrumental "Felt something go" laisse coi. A ne pas laisser s'échapper. Toutefois, l'emblème pop de la région, c'est bien sur Teenage Fanclub. Concert gratuit sous la pluie pour fêter le nouveau millénaire à Glasgow, et pour relancer un nouvel album (Howdy, 1999, Sony) reçu de manière mitigée par le public. Ils font désormais un peu obsolètes, leur véritable succès restera toujours l'incontournable bijou pop "Grand Prix" (Geffen,1995), contenant le célèbre "Everything flows". Un peu sur le retour, donc, il y a quand même dans le reconnaissable quelque chose de réconfortant, ou l'on se complait à se blottir. Même si le groupe n'évite pas toujours les clichés du genre ("I can't find my home" - Howdy) , il sait dénicher des univers subtiles en balançant des morceaux qui s'encrent très aisément dans les mémoires.("Accidental life" et "Dumb,Dumb Dumb" - Howdy). Du classique. Moins
classique, c'est évident, c'est Arab Strap. La mine rongée
d' Aidan Moffat(chanteur-compositeur)ne s'oublie pas. Musique de dépressif
et un réalisme qui touche ("If you go, go for good, don't fucking
joke"- Pyjamas, extrait D'Elephant Shoe, paru chez Go ! Beat en 1999).
Atmosphère lourde et rôle principal donné aux guitares.
Amis d'Arab strap(Aidan chante sur quelques titres), les 4 énergumènes qui composent Mogwai, ont su donner suite au mouvement post-rock (initie par Slint). Leur prochain album, à paraître en avril chez Chemikal Underground, est d'autant plus attendu qu'il a été réalisé sous la houlette de Dave Fridman (Mercury Rev, Flaming lips). La force des "glaswegian", c'est la brutalité mélodique de leurs essais, c'est la rage enchantée et enchanteresse qu'ils produisent. Géniaux touches à tout, ils évoquent une image de conquête d'un nouveau monde et, coutume locale?, assènent souvent leurs fans d'EPs extraordinairement riches et lumineux, dont l'extraordinaire EP dédié à Stanley Kubrick (Chemikal Underground, 1999) ou le suicidaire "Fuck the Curfew" EP (ibid, 1998). Pas de violences gratuites, surtout dans le dernier "Come on Die Young" (ibid, 1999), mais des instruments dépouilles et crus, pour notre bon plaisir. On trépigne d'impatience pour la suite...
Post rock toujours dans un registre un peu différent: Larmousse. Proche d'un espèce nouvelle d'ovni: l'électronica acoustique, auquel un aurait ajoute des chants spectraux. Leur album (Larmousse, 2000, chez Cityslang) est un des évènements oublies de l'an passe, où l'on à peut-être trop regardé vers des horizons bouchés... Car ici, de l'introductif "Static Phase au conclusif "Tape", on reste bouche bée. On trouve certes des racines communes avec Arab strap ou Mogwai, mais le duo développe sa singularité par un don à apaiser plus qu'a tourmenter. Du concentré de volupté. Du grisant partout! Pas de prétexte pour passer à coté... Ayr Unit a mis un pied dans l'electro la plus folle, qu'il sert ca et la dans un breuvage post-rock raffine et somptueux(Un seul trois titre, 2000, chez Mouthmoth). D'inégalables montées en puissance s'achevant dans un enclos ou on aurait enferme des guitares siphonnées ("The movin finger writes...") ou dans de farouches cavalcades héroïco-technoïdes ("Nor all thy tears wash out a wor of it"). Originaire de la cote ouest écossaise, dans une bourgarde reculée, on se demande ce qui a bien pu leur tomber sur la tête. A moins que ce soit inné. Si ce single passe entre vos mains, ne le lâchez pas, il n'y en a pas pour tout le monde. Enfin, et non des moindres, Boards of Canada, abrite chez Warp Records, label sheffieldien décidément complet dans l'électronica et toujours prêt à dénicher d'immenses talents. Le dernier single ("in a beautiful place out in the country", 2000) s'inscrit dans la lignée du phénoménal "Music has the right to children", évoquant des rêves de gosses inavoués, Casimir, le soleil et la lune. Le duo, à l'image de la pochette de son dernier acte en date, est un créateur d'images, à l'infini. Moins sec et inaccessible qu'Autechre, moins spacio-temporelle que Plaid, c'est de l'électro à son zenith. Donc, voila ma sélection, forcement subjective... Si un des disques vous tente et que vous n'arrivez pas à l'acquérir, n'hésitez pas à me contacter...
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