Pierre
vous raconte son Benicassim 2002 (part
1/3) - >>>
Benicasim
Aucune bête au monde.
Le festival de Benicasim est
avant tout une lutte, une aventure moderne.
Une expérience dont on ne se relève généralement
que très douloureusement, et après un long repos.
Puis douze mois s'écoulent, et on oublie. On oublie
la fatigue, la chaleur, le monde, la soif, la fatigue, la
chaleur, le monde, la soif, la fatigue, la chaleur, le monde,
la soif…
alors on y retourne à nouveau, avec un an de plus au
compteur et autant moins de résistance à ce
genre de bêtises.
Je dis ça en guise de
mise en garde, pour les écervelés qui voudraient
s'y rendre l'année prochaine sur un coup de tête,
une impulsion pas vraiment raisonnée.
Benicasim, c'est comme un safari au Kenya, faut faire un check-up
complet avant, des rappels de vaccins, etc. Pareil, sans les
rhinos qui coursent les range-rovers.
Dia 3 - Jeudi/Jueves
Le festival démarre généralement
le jeudi. Coup d'envoi au vélodrome municipal. Le billet
3-jours donne accès au camping festivalier dès
le lundi qui précède mais vu les conditions
de vie dans le champs d'oliviers sus-désigné,
il faut vraiment aimer avoir chaud pour arriver en avance
; ou avoir été poulet basquaise dans une autre
vie. Mais ça, ça vous regarde.
Ce
démarrage au vélodrome, c'est un peu un pèlerinage.
Jusqu'en 1997, le festival s'y déroulait
intégralement. Donc, 1997 : troisième édition
du fib et les dieux se mettent en boule. Il pleut. Non, je
veux parler d'une tempête, une sorte d'ouragan.
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1997
- la scène après l'ouragan (photo Le M@sk
?) |
Bref, la fête fut interrompue
le samedi soir quand la scène cède sous le vent
et manque de tuer YURUTSEI YATSURA en plein concert. Annulation.
Panique. Le public privé de concerts, et notamment
de sa tête d'affiche - BLUR - se répand dans
les rues de la ville, dans ses bars en hurlant le "WoohooOO"
de "Song 2".
Alors voilà. Voilà pourquoi lorsqu'on rentre
sur ce con de vélodrome on garde un profil bas, on
pense aux types qui étaient là en 97 et qui
ont bien cru y passer tous ensemble, avec une gorgée
de bière encore dans le bec.
2002, le vélodrome offre
pour la soirée d'ouverture une affiche plus longue
que jamais.
Sont surtout attendus les français TELEPOPMUSIK, LOS
CHICHARRONS (en DJ set) et THE HACKER (DJ itou).
Les 7 heures de route aidant, j'ai fini au lit de bonne heure
et je pourrais pas vous raconter grand chose. Ah si, NADASURF
ont vraiment été ennuyeux, un coup fatal qui
fait résonner l'appel du duvet.
A 4 heures du matin il pleut dans la tente, une pensée
pour THE HACKER qui commence son set, sous la pluie lui aussi.
Dia 4 - Vendredi/Viernes
Réveil tardif car, étonnamment,
il ne règne pas une chaleur accablante. Et pour cause,
il pleut. Ceux qui se souviennent de 1997 s'inquiètent
pour de bon, les autres râlent doucement.
Finalement le soleil réapparaît
sans prévenir ; il fait une chaleur à crever.
Tout le monde est rassuré.
Arrivée
tardive sur le site du festival, juste pour attraper THE
NOTWIST qui entament leur set. Il aurait été
dommage de rater ça. Menés par un Markus Acher
visiblement très content d'être là, nos
amis allemands donnent un excellent concert. L'exécution
de "Neon golden" sur scène est très réussie
et les ritournelles electro-minima-pop semblent échapper
à leurs interprètes pour revenir les animer
comme des marionnettes au bout de leurs fils. Markus Acher
devient frénétique, comme happé par un
boogie post-electro qui le fait frapper sa guitare pour la
transformer en synthétiseur à six cordes. Pourquoi
tourner les boutons d'un Korg quand on peut taper sur une
guitare? Quand on a, comme THE
NOTWIST, débuté avec le punk hardcore
on garde forcément de mauvaises habitudes. Tant mieux,
nous on aime beaucoup ça.
Suite
du programme avec THE
MONTGOLFIER BROTHERS. On a l'impression d'être
dans leur salon. Les textes de Roger Quigley trônent
sur un pupitre et le bonhomme devise tranquillement avec ce
qui semble être un troupeau de potes venus là
pour l'occasion (et le soleil - ils aiment ça le soleil,
les anglais! ils font pas la fine bouche comme moi : ils cuisent
et prennent des coups de soleil sans râler parce qu'ils
savent que le reste de l'année chez eux, il fait tout
gris).
Le concert sonne forcement plus sec et dépouillé
que les disques si finement arrangés du groupe, mais
l'émotion est là, détendue, l'air de
s'en foutre mais bien là.
Après je ne me souviens
plus très bien, je revois des déambulations
difficiles dans la foule, accompagnés d'échos
de "sun hits the sky" de SUPERGRASS qui ont l'air toujours
aussi bons, puis la gueule mal peignée d'un JOSEPH
ARTHUR trop loin, inaccessible.
Inaccessible car on court! Il faut courir pour ne pas rater
ce qui est déjà reconnu comme l'un des gros
rendez-vous du festival : MISS
KITTIN & THE HACKER!
Et
ce fut effectivement le cas. MISS
KITTIN & THE HACKER, c'est un petit peu BRIGITTE
BARDOT & GAINSBOURG propulsés dans les années
2000. Production taillée pour la hype, provocation,
libido… tout ce qu'il faut pour enflammer un public normal
; alors imaginez l'effet sur des espagnols! Le chapiteau de
l'Escenario Motorola se transforme en une énorme fiesta
electro salace. KITTIN danse, saute, baragouine en anglais,
perd ses pompes, se trémousse… chante. Tout ça
sans aucunes prédispositions évidentes et encore
moins d'efforts manifestes pour s'appliquer. Tout le secret
est là. On est là pour s'en foutre, et s'amuser
comme des petit fous. S'il faut reconnaître un talent
aux espagnols : c'est bien celui d'adhérer en moins
de deux beats à ce genre de discours - le français
chipote "elle sait pas chanter cette greluche", l'espagnol
lui, il s'en fout, il fait pas de manières, il danse,
il saute, il reprend en cœur, et il a raison.
Le concert ne concède aucun temps mort, aucune perte
de vitesse, culmine sur "Frank Sinatra", étonne avec
"Sweet dreams". C'est la fête, cette fois c'est sûr.
Pause forcée pendant LOS
PLANETAS, véritable institution locale programmée
chaque année sur une scène plus grande, et qui
y trouve de moins en moins de crédibilité à
mes oreilles. MUSE, re-pause.
Devant la foule alors massée, on renonce à traverser
tout le site du festival jusqu'à DJ SHADOW. Les remords
sont terribles, mais il faut se rassurer en pensant qu'il
jouera une semaine plus tard à la Route du Rock de
Saint Malô.
Finalement
ce qui fait encore marcher le pèlerin au bout de la
nuit, c'est l'attente de Robert Smith et de THE
CURE.
Et quelle attente! Ce n'est pas comme attendre n'importe quelle
starlette du rock'n roll, mais un type et un groupe devenus
de véritables institutions, des icônes. Même
un gosse de maternelle au Bangladesh sait dessiner un Robert
Smith en faisant un rond, des cheveux dressés et des
yeux maquillés.
Desservis par un son de merde
(globalement mauvais cette année, à quelques
exceptions près) CURE
administre un très bon concert qui s'inscrit sans surprise
dans la même veine que ceux produits en 2000 lors de
la tournée "Bloodflowers". Revisite de "Desintegration",
"Pornographie" mais aussi de "Wish" (ses titres les plus sombres
- "the edge of the deep green sea"…). Un concert pour fans,
pour connaisseurs ; pas exactement le plus adapté à
un cadre de festival. Les tubes et les classiques viendront
au rappel : "Boys don't cry", "Just like heaven" et "A forest"
pour finir.
Hou! C'était bien ce premier
jour! Avec le monde qu'il y avait ça promet pour demain
samedi où l'affiche est encore plus terrible… On va
peut-être mourir?
La
suite >> Samedi/Sabado
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