Pierre
vous raconte son Benicassim 2002 (part
2/3)
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Dia 5 - Samedi/Sabado
Samedi, on prend presque un rythme
de croisière, on a repris ses marques sur le site du
festival - les repères sont là.
Chaque été on retrouve les mêmes chapiteaux,
les mêmes cahutes à bebidas, etc. Comme si tout
ce grand décor restait planté là toute
l'année. Vide 51 semaines par an, laissé en
proie aux bandes de délinquants armés de Benicasim
et sa région qui viennent s'y affronter, tels des desperados
ibères, Eastwoods péninsulaires, sur une très
large main street balayée par le vent qui soulève
la terre battue rouge de la Costa Azahar.
En fait, il n'en n'est rien. Tout est démonté
à la fin du festival et rangé dans des boites
prévues pour. Beaucoup plus tard, des types ressortent
tout des boites et reconstruisent tout en pareil - la mine
sombre, parce qu'il manque 2 boulons de 12 et que personne
ne sait si la scène va pouvoir tenir dans ces conditions.
Hors saison, le site sert à des réunions de
tuning. C'est la dure réalité. Heureusement
pendant ce temps-là, nous, nous sommes sagement au
bureau. Ouf!
La journée décolle
avec DEPARTURE LOUNGE. Quand on ne connaît du
groupe que les remixes réalisés par KID LOCO,
la sauce paraît bien sèche. Mais le groupe de
Tin Keegan livre un set new folk très réussi,
marqué par une reprise du "Survivor" des DESTINY'S
CHILD. Quelle bonne idée.
Le concert fini, au moment d'aller
chercher tranquillement une bière, le site est déjà
noir de monde. L'expédition boisson devient un exploit.
Devient de plus une nécessité absolue, avec
tout ce monde, tout cette calor.
Pourquoi tous ces gens? Une seule réponse : RADIOHEAD.
RADIOHEAD, et, en
facteur aggravant une tapée d'autres groupes qui pourraient
tous individuellement tenir lieu de tête d'affiche :
SUPER FURRY ANIMALS, BELLE
& SEBASTIAN, PRIMAL
SCREAM…
La
soirée s'annonce terrible.
Pas
de temps mort, on enchaîne aussi sec avec THE
BETA BAND.
C'est touffu, manifestement hirsute, irrévérent
et post-folk.
Boucles, guitare folk et trompette pour un set posé
sur des sommets. Une sorte de psyché-folk pour bonzes.
Le public unanime lévite sur "High the rain" ou "She's
the one".
Très très bien tout ça.
La soirée s'annonce terrible.
La nuit commence à tomber
pour la montée sur la grande scène des SUPER
FURRY ANIMALS. Déjà rencontrés
en Espagne pour un concert au BAM (Barcelone) 98, les SFA
comptent parmi nos gallois préférés,
avec GORKY'S ZYGOTIC MYNCI.
La
soirée cesse soudain de s'annoncer terrible - on est
en plein dedans. Voilà, c'est maintenant que c'est
terrible! On saute partout, on gesticule, on n'hésite
surtout pas à marquer son contentement avec de nombreux
gestes désordonnés de tous ses membres. Terrible
; c'est sur scène que les SUPER
FURRY ANIMALS portent le mieux leur nom, abandonnant
toute retenue propre à l'homme occidental civilisé
pour sombrer dans une frénésie bruyante et jouissive.
Le set regroupe surtout des titres des deux derniers LPs du
groupe "Rings around the world" (2001) et "Mnwg" (2000, tout
en gaëlique).
Respectant ses habitudes, les gallois concluent sur un "The
man don't give a fuck", monté sur boucles, tournant
ab-lib après le départ de Gruff et ses compères.
A partir de là, tout s'enchaîne.
On pourrait presque perdre son sang-froid. Sur trois scènes
différentes, au même instant, trois groupes à
ne pas manquer. C'est le moment de montrer qu'on sait nager
dans la foule à contre courant, comme un saumon.
Grande
scène, BELLE
& SEBASTIAN. L'édition 2001 les avait vus
sur la seconde scène, sous un chapiteau prêt
à céder sous la pression d'un public fan jusqu'à
l'entassement brutal dans un espace confiné. Le succès
avait alors forcé l'organisation à reprendre
le son du concert pour le rediffuser sur la façade
de la grande scène à un public privé
d'images, écoutant religieusement, assis sur le bitume.
Cette année, c'est fini ces bêtises, le groupe
joue sur l'escenario Verde, by night, comme les grands. Ces
types n'avaient jamais vu une telle foule les attendre. (c'est
vrais que les espagnols sont très très fans
de B&S, ils rempliraient des stades, si, si!)
Est-ce cette surdimension, l'absence de la chanteuse démissionnaire
Isobel, ou la faiblesse des titres inédits (à
venir sur "Story telling")… je ne sais pas…
C'est la déception qui prime.
Pour moi qui ai vu BELLE
& SEBASTIAN à trois reprises, (étonnement
à chaque fois en Espagne) j'énoncerai le postulat
suivant : "plus la salle est petite, meilleur est le concert".
Pendant
ce temps là, beaucoup plus triste et pourtant tellement
plus convainquant : LOW.
Les américains improvisent une messe païenne sur
la scène 2, le public est recueilli et visiblement
béatifié.
Au même instant, Steve
Austeen à mal tourné : il habite Melun.
Beaucoup plus près, puisque
sur la scène 3, les deux protagonistes de ARTIST
UNKNOWN sont en train de tout casser. Arpentant la
scène dans la largeur, la groovebox (ou je ne quel
appareil mystérieux) à la main, sorte de Chuck
Berry des temps electro ; ou mieux, incarnation du Sid Vicious
way of electro.
C'est
vrai qu'ils sont tout de même inquiétants ces
types masqués, intégralement couverts de denim.
Et puis ils doivent avoir chaud. C'est sûr, sinon il
n'y aurait pas tant de buée dans leurs lunettes. Si.
Il paraît qu'il ont fait un overdub terrible par dessus
"Oops I dit it again" de Britney Spears, mais je n'étais
pas là - certainement devant BELLE
& SEABASTIAN ou LOW,
ou en train de courir en ces trois scènes éloignées
de distances qui paraissent infranchissables lorsque saturées
de festivaliers, eux-mêmes saturés de bière.
Après tous ces efforts,
pause. Bière. Et on change de pellicules. Regard à
la montre, merde, on vient de rater SAINT ETIENNE.
PAUL
WELLER sur la grande scène. Pas vu depuis 1995,
même formation, quelques rides et cheveux blancs en
plus.
Mêmes ballades poussives au piano, mais également
quelques bons morceaux faisant encore honneur au Modfather
("Changing man" très bon moment).
Mais dans l'ensemble, c'est un peu navrant.
Next!
Et next is… RADIOHEAD.
Autant dire, que là, les plaisanteries, c'est fini.
L'espace devant la grand scène est plus impraticable
que jamais. Tout le monde semble venu pour eux.
Et
effectivement, c'est monumental.
Thom
Yorke a l'air d'aller encore plus mal, et pourtant il est
plus touchant que jamais.
Le concert est vraiment de Très Haute Qualité.
Cette fameuse THQ, là, sur scène pendant plus
d'une heure.
Puisant dans leur trois derniers album plus le prochain, RADIOHEAD
met tout le monde par terre.
C'est certainement le concert
dont on gardera un souvenir proéminent sur ce FIB 2002.
Après tant d'éclat,
difficile d'enchaîner…
Alors
on envoie PRIMAL SCREAM.
Le scream team vient présenter son nouveau LP fraîchement
paru, "Evil heat". Affublé d'un son aussi mauvais que
celui de RADIOHEAD
était parfait, PRIMAL
SCREAM ne convainc pas, ou qu'à moitié.
S'enlisant dans de trop longs enchaînements de titres
techno-hardrock (veine "Swastika eye") le groupe livre un
set ou manquent trop de classiques (pas de "Higher than the
sun", trop peu d'extraits de "Vanishing point").
Tout de même un instant
magique, avec cet extrait du nouveau LP : "Autobahn 66" qui
embarque tout le monde pour une virée planante sous
influences NEU, CAN, et bien avouée, KRATWERK.
Noter qu'en 2000 PRIMAL
SCREAM n'avait pas pu joué "Higher than the
sun" jusqu'au bout, il s'agissait de leur rappel et l'organisation
du festival, les jugeant trop longs, avait coupé le
courant.
De la présence simultanée
de WELLER et du
SCREAM on attendait
également un hypothètique duo sur "When the
kingdom comes" (face B du single "Accelerator", plan mod imparable,
featuring WELLER à la Rickenbecker 12 cordes, terrible
je vous dis!)
Mais rien.
Après tout ça on
a les oreilles en marmelade, et c'est certainement pas avec
la guitar-house de "RINOçEROSE" qu'on va les
soigner.
La fatigue aidant, au lit!
La
suite >> Dimanche/Domingo
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