C’est un quatuor tendu qui investit la petite Carling stage, le temps de vérifier que les guitares sont bien branchées et de couvrir la scène de légers nuages de fumée ( de cigarette ), nos hommes sont lancés. Pourtant à quelques mètres d’eux, il se révèle impossible de croiser un seul de leurs regards, leur jeu à l’image de leur musique est marqué par une réserve qui s’apparente presque à de la pudeur.

Lorsque Aurelio Valle chante, il ferme les yeux, c’est avec une douceur des plus languides qu’il susurre ses paroles comme échappées d’un rêve qui semble parfois se muer en cauchemar. Sa voix apaise le rock revisité de Calla, où les chansons souvent lentes prennent le temps de déplier chacun de leurs pétales sur des plages instrumentales ténébreuses, venimeuses, envoûtantes. Souvent, la musique de Calla est grave et belle. Sur disque comme sur scène. Si la mélodie ruse et ne se livre pas forcément tout de suite, le groupe réussit ici, grâce à une guitare plus présente et légèrement plus agressive, à habiter chaque morceau.

Les chansons, qui sont libérées du format pop mais possèdent des motifs récurrents, peuvent ainsi développer plusieurs humeurs. C’est alors que des atmosphères inquiétantes et lynchiennes se trouvent soudainement traversées par des veines lumineuses, éclatantes ou douces. La rythmique sophistiquée et recherchée qui joue avec les contre temps apporte beaucoup notamment sur Televised, magnifiquement interprétée, toute en tension souterraine qu’interrompt un break de guitare rageur, aux confins du chaos. Le groupe jouera presque exclusivement des extraits de son dernier album Televise, à l’exception de leur excellente reprise de Can, Mother Sky et du joli Fear of Fireflies tiré de Scavengers, leur album précédent. Tout en subtilité, les chansons élégantes et énigmatiques de Calla dérangent, brouillent et ravissent nos sens.